Article d'expert
Par Jean-Yves Guilbaud & Laurent Boidot
Quand, comme nous, vous avez travaillé dans plusieurs entreprises, vous aurez peut-être observé deux phénomènes récurrents :
Le cycle de mise en place de nouvelles pratiques au sein d’une organisation est bien connu. Prenons un exemple pas nécessairement vertueux : parce que l’on était « charrette », il a fallu travailler tard le soir… Et s’est posé la question de nourrir ces employés dévoués :
Tout cela peut avoir l’air très spontané. Mais pour que cela ait pu se mettre en place, il a fallu un soutien actif du management. Des règles ont été fixées (pas d’alcool, locaux propres, …), des moyens mis à disposition (coin repas, poubelle, …), des responsabilités définies. Il a fallu s’assurer que le gardien de nuit était au courant, contrôler qu’il n’y avait pas de dérives et que les résultats attendus étaient au rendez-vous. Et puisqu’ils l’étaient, féliciter tout le monde…
C’est ce sujet du soutien du management et de la structure qu’aborde l’un des Domaines d’Aptitude du CMMI : « Pérenniser les Habitudes et la Constance » (en anglais SHP : Sustain Habit and Persistance »).
L’habitude c’est une pratique dont on a du mal se passer. C’est un terme qui n’est pas très bien valorisé dans des périodes où découverte, imagination prennent le haut du pavé. Pourtant, derrière ce mot, il faut voir la capacité à faire quelque chose simplement, sans délais et efforts superflus de mise en place.
La constance, c’est l’obstination à faire quelque chose quelles que soient les circonstances. Quand les conditions sont dures, on a vite tendance à vouloir laisser tomber certaines activités pour se concentrer sur les actions de survie immédiate. Quitte à s’apercevoir plus tard des problèmes que cela pose…
Le Domaine d’Aptitude SHP est construit autour de 2 Domaines de Pratiques : GOV -Gouvernance- et II- Infrastructure de mise en œuvre (en anglais Implementation Infrastructure).
Comme nous vous l’avons expliqué dans notre premier article, les pratiques de GOV s’organisent en quatre groupes de maturité croissante.
Au premier niveau, GOV a pour rôle de donner du sens aux activités demandées : que doit-on faire, quelle démarche est choisie pour atteindre les objectifs ? Qu’est-ce qui est important et qu’est-ce qui est secondaire ? Par exemple, la date de livraison est vitale, les horaires de travail deviennent secondaires.
Le deuxième niveau ajoute deux dimensions essentielles à la mise en place d’une culture d’entreprise :
D’autre part, la mise en place des canaux qui vont permettre de suivre la mise en œuvre de ces directives, et l’atteinte des objectifs : Mon management me demande quelque chose : il suit mon travail, et sait reconnaître quand je l’ai fait correctement et avec succès.
Le troisième niveau enrichit le précédent par une dimension essentielle : la mesure de la performance des processus. Elle va permettre de suivre leur mise en œuvre, et de faire des choix d’amélioration. Les mesures – productivité des équipes, nombre de défauts, … – sont utilisées pour affiner les méthodes de travail et garantir qu’elles restent en ligne avec les objectifs de l’entreprise.
Au quatrième niveau enfin les améliorations sont choisies sur la base d’une analyse statistique de la performance mesurée. Une étude est mise en place pour analyser la productivité. On constate que pour les projets ayant recours aux sessions nocturnes, un cercle vicieux s’installe : l’augmentation immédiate de la productivité se paye par la fatigue des équipes, une baisse de la productivité dans les semaines suivantes … et de nouveaux retards. Un nouveau processus est mis en place pour mieux suivre les jalons et diminuer le recours à ces rushes épuisants.
On voit donc dans le modèle CMMI le lien fort qui existe entre la gouvernance, l’amélioration des processus et la gestion de la performance. Notre prochain article détaillera comment cette gestion de la performance se place au cœur du modèle CMMI 2.0.
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