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Comprendre et utiliser le modèle CMMI #1

Des milliers de démarche d’amélioration conclues avec succès

Le CMMI a récemment fait l’objet d’une refonte importante, la troisième depuis sa création, il y a désormais plus de trente ans quand a été publié le premier CMM. Pendant cette période, à travers le monde :

  • Plusieurs dizaines de milliers de sociétés l’ont utilisé pour guider et valider leurs démarches d’amélioration
  • Plusieurs centaines de milliers de personnes ont été formées à son utilisation

« Tous les modèles sont faux mais certains sont utiles. » (G. Box)

Mais qu’est-ce exactement que le CMMI ? De manière assez simple, les principaux mots clefs sont dans son nom : Capability Maturity Model, ce que nous traduirons en français par Modèle d’Aptitude et de Maturité.

Modèle ! Ce premier mot est peut-être aussi le plus ambigu. Une incompréhension fréquente sur le CMMI est de croire qu’il s’agit d’un modèle à suivre, de recettes à appliquer pour être performant. Ici le mot modèle doit être compris dans son sens scientifique : un outil qui permet de modéliser les activités (processus) industrielles et intellectuelles mises en œuvre dans une entreprise pour atteindre ses objectifs, pour mieux les comprendre, améliorer leur résultat et diminuer les risques encourus.

Progresser et s’améliorer… sans se mettre en danger

La Maturité est le concept qui permet de rythmer l’apprentissage et le progrès. Notre expérience personnelle nous rappelle tous les jours que ce ne sont pas des évolutions continues mais qu’elles fonctionnent par paliers. C’est lorsqu’un niveau de maturité a été acquis qu’il devient possible de mettre en œuvre de nouveaux savoirs, de réaliser de nouvelles activités. L’histoire des individus, des entreprises et des sociétés regorge d’exemples qui démontrent qu’il est toujours coûteux et parfois dangereux de tenter d’adopter de nouveaux savoirs ou de nouvelles pratiques quand le niveau de maturité requis n’est pas atteint.

Le CMMI identifie au sein des entreprises cinq niveaux de maturité au travers desquels va se construire de manière cumulative la capacité à obtenir de meilleures performances, à diminuer les risques et optimiser la valeur créée. Ces niveaux rythment les démarches de progrès de l’entreprise. Par exemple, pour pouvoir efficacement capitaliser, utiliser et adapter des acquis communs à l’entreprise (niveau 3 ajusté) l’entreprise doit au préalable se forger la discipline d’organiser les activités, de décrire cette organisation au travers de plans et de suivre et contrôler la mise en œuvre de ce qui a été décrit (niveau 2 discipliné).

Améliorer oui, mais pour créer plus de valeur…

L’Aptitude représente la génération de valeur par l’entreprise au travers de ses activités. Le modèle CMMI identifie quatre grandes catégories d’activités : Faire, Gérer, Faciliter et Améliorer. Ces catégories organisent les Domaines d’Aptitude (Capability Areas), qui explicitent le type de valeur attendue par l’entreprise.

L’aptitude est modélisée au travers de pratiques opérationnelles qui décrivent les différentes composantes de l’activité et de la valeur à créer. Ces pratiques opérationnelles sont regroupées en Domaines de Pratiques (Practice Areas).

« Continuité des opérations pendant le confinement ». Que dit le modèle CMMI ?

Essayons d’illustrer ces deux concepts d’aptitude et de maturité autour d’un exemple malheureusement d’actualité. L’un des Domaines d’Aptitude que propose le modèle s’intitule « Gérer la Résilience du Métier » (Manage Business Resilience). Il est construit autour de trois Domaines de Pratiques.

  • Gérer les risques et opportunités
  • Résolution et prévention des incidents
  • Continuité dont la valeur créée, à laquelle nous sommes tous très sensibles en ce moment, est de survivre à des interruptions majeures ou des événements catastrophiques…

Survivre

Le premier niveau des pratiques de Continuité concerne l’aptitude à mettre en place, éventuellement de manière réactive, et à piloter les approches (télétravail par exemple) permettant de continuer au mieux l’activité. La valeur créée est ici évidente et correspond au niveau opérationnel maintenu.

Se préparer aux temps difficiles

Nous sommes nombreux à voir les limites des approches réactives. Le niveau 2 améliore notre aptitude en organisant ces approches : identifier les fonctions essentielles et les ressources critiques, construire un plan de continuité de l’activité. L’amélioration de valeur réside dans une réponse plus adéquate et plus pertinente aux évènements et dans la réduction du temps d’interruption.

Mobiliser toute l’organisation

Des plans de continuité existent. Encore faut-il qu’ils soient connus, compris, … et efficaces. Le niveau 3 améliore encore cette aptitude en mettant en place les activités qui garantissent que ces plans soient opérationnels au moment voulu : former les personnes aux modifications entrainées par le plan de continuité, vérifier – sans attendre la crise – que le plan de continuité fonctionne et répond aux besoins de l’entreprise et ses clients, et que ses prérequis sont prêts. Des plans plus complets, plus rapides à déployer : là encore la valeur créée saute aux yeux.

Cet exemple, permet d’illustrer la brique de base sur laquelle s’appuie le modèle – la pratique. Celle-ci correspond toujours à une activité opérationnelle observable, avec des résultats tangibles et à laquelle on va pouvoir associer une valeur créée. C’est cette dimension très opérationnelle du modèle qui le rend facilement compréhensible par les acteurs de l’entreprise.

Téléchargez notre guide pour comprendre et utiliser le CMMI

Un modèle qui s’enrichit et s’adapte aux évolutions des entreprises

Depuis sa création, le modèle CMMI s’est considérablement enrichi et diversifié. Créé au départ pour répondre au besoin des développements de logiciel, en particulier dans le monde de la Défense, il répond maintenant aux besoins de l’ensemble de la communauté des entreprises développant des produits ou fournissant des services, dans les domaines industriel et tertiaire. Il continue à s’enrichir et la version 2.0 est structurée pour permettre l’ajout de Domaines d’Aptitude supplémentaires. Dans les prochains mois, les aspects Sécurité, Sureté ou Gestion de la Force de Travail vont compléter les éléments existants.

Cet enrichissement s’appuie en particulier sur les retours des démarches d’amélioration et des évaluations de niveau de maturité faites dans le monde. A titre d’exemple, CMMI a permis d’analyser un nombre très important de mise en place de projets AGILE et en particulier SCRUM dans des contextes très différents. Cette expérience particulière est mise en valeur dans la contextualisation de la description des aptitudes ou des pratiques pour ce type de projets ou d’organisations.

Enrichissement et diversification permettent au modèle CMMI de toujours mieux répondre au besoin essentiel de toute organisation : adapter et améliorer ses pratiques pour obtenir une meilleure performance, créer plus de valeur et rester en ligne avec ses objectifs stratégiques.

Dans notre prochain article, nous essaierons d’illustrer l’une des principales questions qui se posent aux entreprises dans leurs démarches d’amélioration : « Comment rendre pérennes les bonnes pratiques et s’assurer qu’elles restent appliquées dans les temps difficiles ? »

Par Laurent Boidot, Consultant Performance.

Publié le 21/05/2020